Anglicismes, québécismes et belgicismes .
Le discours de Maurice Druon lors de l'inauguration du site internet de l'académie
française ne se limite pas à la question de la féminisation mais évoque la deuxième
raison qui a poussé les hommes et femmes en habit vert à s'installer sur le grand
réseau informatique. La grande menace des temps à venir tient à ce que toutes les
communications, écrites, orales, informatiques, risquent de ne plus s'opérer que dans un
seul idiome, ce qui serait stérilisant pour la pensée créatrice, en tous domaines.
Nombre d'anglophones, en apparence bénéficiaires d'une certaine suprématie
linguistique, commencent à être conscients de ce péril, voyant l'entropie poindre sous
l'uniformité . [...] Telle est, Messieurs, la magie moderne. Puisse, grâce à ce conte
de fées devenu réel qu'est la communication immédiate, la langue française, être,
dans l'univers entier, plus présente, et plus aimée . L'objectif est clair, il s'agit de
lutter à l'échelon planétaire contre l'influence de l'anglais. Bataille qu'avait déjà
entamée, à l'échelon national, Jacques Toubon en 1994
avec sa fameuse loi relative à l'emploi de la langue française .
Le cadre juridique étant clairement défini nous pouvons nous pencher sur la hantise de
tout puriste: les anglicismes! La Maison de la francité a réuni un groupe de travail
composé de linguistes, de traducteurs et d'amateurs particulièrement attentifs aux
problèmes de langues. Le CQFD (Cercle de qualité du français
dynamique) propose des équivalents français aux anglicismes ayant tendance à s'insinuer
aussi rapidement que la technique évolue. Vous trouverez à votre disposition un lexique anglais et un lexique
français consultables en ligne .
Le domaine de la mercatique n'échappe pas non plus à la déferlante anglicisante. Au plaisir des mots débusque
pour vous anglicismes et néologismes propres à la mercatique et au marketing.
Pauline Cyr , chroniqueuse de l'Express, vous propose un petit exercice
vous permettant de faire preuve de votre perspicacité en décelant les nombreux
anglicismes que contient le texte qu'elle vous a concocté avec amour. Texte, réponses et
explications vous attendent à l'adresse suivante: http://www.tfo.org/c_orthog/chronique2.html
.
Mais un anglicisme est-il vraiment un anglicisme? Il semble parfois légitime de se poser
cette question lorsque l'on constate qu'à maintes reprises les termes considérés comme
des anglicismes dans l'hexagone sont des gallicismes pour les anglophones. Ainsi les
fameux Jeans américains n'étaient-ils pas en toile fabriquée à Nîmes (d'où
l'appellation Jeans Denim) et teints grâce au bleu de Gênes qui, prononcé à
l'américaine, donnera la dénomination si connue aujourd'hui? D'autres anglicismes aux
origines "douteuses" ont étés répertoriés et analysés par Pierre Weis .
Face aux anglicismes, les Québécois sont sans doute les défenseurs les plus
intransigeants de la langue française, ce qui les pousse parfois à donner au français
une évolution toute différente de celle qu'il peut connaître en Europe, créant ainsi
ce que les linguistes appellent des québécismes . Trésor de la langue
française au Québec (TLFQ) l'équipe de recherche en lexicologie et lexicographie de
l'université de Laval vous présente son combat, ses projets et le fruit de ses travaux.
. Le TLFQ a commencé par la construction d'un fichier lexical représentatif de
l'ensemble des usages caractéristiques du français québécois depuis l'époque de la
colonisation jusqu'à nos jours, puis est passé à la réalisation d'un dictionnaire
historique des québécismes. Ce dictionnaire se compose d'articles approfondis,
s'adressant à un public cultivé de lycéens et d'étudiants. Il a pour but de donner une
description complète des québécismes, incluant une illustration à partir de diverses
sources, et de répondre aux questions qui sont au centre des débats sur la langue
française au Québec (identification précise de ce qui est caractéristique,
fonctionnement des québécismes dans le temps, l'espace et les couches sociales,
origines, etc.). La visite de ce site est indispensable pour comprendre quelles
implications politiques (géopolitiques), sociales, culturelles se cachent dans la lutte
des québécois pour défendre leur langue et leur identité.
Si le site sur les français régionaux de Belgique relève également
d'une démarche d'affirmation identitaire ce n'est pas en réaction à la menace
linguistique anglo-saxonne, mais plutôt face à l'arrogance du français hexagonal qui se
veut détenteur du monopole du bon usage. Des signes linguistiques aux acceptions
inconnues en France, aux particularités syntaxiques en passant par les particularités
phonétiques, toutes les formes de belgicismes sont passées en revue. Marc Van
Campenhoudt ne se contente pas de faire un inventaire de toutes les formes de belgicismes,
il explique également leur origine, qu'elle soit régionale (picardisme, wallonisme,
germanisme, anglicisme, africanisme) ou locale. Il est d'ailleurs intéressant de
constater que les francophones de Belgique confrontés comme leurs cousins du Québec aux
problèmes de bilinguisme, aux lois du marché linguistique ou au voisinage des langues
germaniques -- lesquelles sont plutôt ouvertes aux mots étrangers en général et
anglais en particulier -- sont plus perméables aux anglicismes (lift, full-time,
dealer...). Vous trouverez cette étude passionnante sur le site de l' AUEPLF (Association
des universités partiellement ou entièrement de Langue Française) à l'adresse
suivante: http://www.aueplf.fr/termisti/beintro
. Vous y trouverez une bibliographie des plus intéressantes qui vous permettra
d'approfondir la question après cette mise en bouche prometteuse.
...[ Anglicismes et néologismes (suite) ]
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